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Writer's pictureLa Petite Sirène

Don't touch children's bodies! - Paper n°6

Papier de Jacques Robert


De façon étrange, la douce folie qui s’empare de certains adolescents qui se sentiraient mieux s’ils appartenaient à l’autre sexe est devenue un « phénomène de société » qui agite tous les médias. S’il est un âge où l’on est mal dans sa peau, c’est bien celui de l’adolescence ! Que chaque lecteur se souvienne de ces années qui sont difficiles pour tous, certes à des degrés divers. Mieux que moi, psychologues, psychiatres, pédiatres ont analysé ce monde nouveau qui s’ouvre parfois dès l’âge de 11 ans, souvent plus tard, et qui se prolonge… jusqu’à l’âge adulte ! Évolution du corps et de ses fonctions, éveil de désirs nouveaux, tiraillements entre la famille et ce nouvel espace social qu’est le collège, tout se conjugue et s’additionne pour faire de ces années une période éprouvante, mais que l’on passe sa vie à regretter : demandez à François Mauriac !


Au lieu d’aider et de guider les jeunes dans cette traversée, certains adultes ont fait le choix de capituler devant les lubies de leurs enfants. Certes, ce ne sont pas toujours des lubies, et le désir d’appartenir à l’autre sexe est parfois enraciné profondément dans le psychisme des adolescents et des pré-adolescents ; la dysphorie de genre n’est pas un mythe, c’est une pathologie qui doit être prise en charge par des professionnels compétents, psychiatres et psychologues. Mais l’inquiétude apparaît devant le nombre de jeunes qui souhaitent ainsi faire une « transition de genre », comme était inquiétante l’épidémie de suicides des jeunes filles de Milet que raconte Plutarque. Cette nouvelle épidémie doit être considérée avec beaucoup d’attention et d’empathie et constitue certainement un problème de santé publique.


Or, en marge de ce sentiment contagieux de mal-être des adolescents, amplifié par l’usage immodéré des réseaux sociaux, des mouvements de soutien se sont mis en place ; ce sont des adultes, bien évidemment, qui sont à la manœuvre, soit transgenres eux-mêmes, soit soutenant tout ce qui leur paraît « antisystème ». Il s’agit pour eux d’empêcher toute réflexion, de bannir toute étude objective, afin d’imposer un point de vue, celui qu’ils croient être bénéfique aux adolescents mal dans leur peau. Malheur à la ville dont le prince est un enfant[1] ! L’évolution du regard sur le corps des adolescents au cours des 100 dernières années est stupéfiante. Souvenez-vous de cette tolérance que l’on manifestait pour ceux qu’attiraient sexuellement les adolescents ou qui décrivaient ces désirs dans leurs romans : Gide, Montherlant, Nabokov, Gabriel Matzneff, Yves Navarre[2]. Cette tolérance a disparu, fort heureusement : on qualifie bien de pédophilie ces comportements, et on les réprime. Olivier Duhamel est maintenant honni pour sa liaison avec son beau-fils de 14 ans ; je ne crois pas qu’il l’eût été il y a 50 ans…


Il a fallu des années pour que Vanessa Springora témoigne de la « manipulation psychique implacable » que lui a fait subir Gabriel Matzneff dont elle a été victime[3] et opère un retournement des valeurs. Des années pour que Camille Kouchner dénonce le comportement pédophile incestueux de son beau-père[4]. Or, à quoi assistons-nous avec les soutiens quasi-officiels que reçoivent les activistes qui militent en faveur de cette liberté de changer de sexe ? À un phénomène apparenté à celui qui a fleuri si longtemps. Laissons les adolescents libres de choisir ! Vanessa Springora se croyait « libre » de choisir de coucher avec Matzneff, le frère jumeau de Camille Kouchner n’a pas repoussé Duhamel et s’est sans doute cru « libre » lui aussi. Ils ont été odieusement manipulés par des adultes et ont mis des années à se reconstruire. Les adolescents d’aujourd’hui se sentent « libres » de choisir le sexe qui leur paraît plus adapté. Qu’en sera-t-il dans quelques années, surtout quand des modifications irréversibles de leur anatomie et de leur physiologie se seront produites ?


Lorsque la lutte contre la pédophilie s’est mise en place et que son ampleur chez les prêtres, les éducateurs, les coachs et surtout dans les familles (la partie cachée de l’iceberg) a été peu à peu révélée, le mot d’ordre aurait pu être : « On ne touche pas au corps des enfants ! » À quoi assiste-t-on actuellement ? À la mainmise de certains adultes, parmi lesquels des professionnels, hélas ! sur le corps des enfants. Et avec parfois la bénédiction (incompréhensible à mes yeux) des parents, de façon tout à fait analogue à la complicité de la mère de Vanessa Springora, plus ou moins flattée de voir un quinquagénaire célèbre s’intéresser à sa fille de 14 ans. Ces professionnels, chirurgiens et endocrinologues[5] au premier chef, mutilent les adolescents, parfois par complaisance, parfois par soumission à la doxa ambiante, pour d’autres encore par croyance de faire le bien –puisqu’on leur dit que ce sont les normes de soin : castration par émasculation ou mammectomie bilatérale pour les chirurgiens (en donnant d’autres noms à ces opérations, pour les euphémiser), castration chimique et prescription d’hormones, œstrogènes, progestérone, testostérone pour les endocrinologues, sans connaître, faute de la moindre étude sérieuse, les conséquences à long terme de ces interventions. La vie ne se termine pas à la fin de l’adolescence !


D’une part, on recense nombre de jeunes adultes qui, après leur « transition », regrettent les mutilations dont ils ont été les victimes consentantes, lors d’une décision prise à l’âge de l’indécision. C’est un voyage sans retour qu’ils ont entrepris. La queue des lézards repousse, les organes des mammifères n’ont qu’une vie. D’autre part, quand on connaît la destruction du corps et le risque d’hépatocarcinome des bodybuilders ou des sportifs se dopant à la testostérone, quand on connaît les risques de cancers du sein, de l’endomètre, des ovaires induits par les œstrogènes mal dosés, on ne peut que s’insurger contre ces prescriptions intempestives. Rappelons qu’un cancer du sein ou de la prostate peut mettre jusqu’à dix ou vingt ans pour parvenir au stade clinique à partir des altérations oncogéniques initiales. Comment vont réagir ces jeunes, une fois adultes, s’ils développent un cancer hormono-dépendant ? Qui accuseront-ils ? Leurs médecins imprudents, leurs parents dépassés par les événements, les organismes de santé publique qui ont laissé faire ? Les Vanessa Springora seront nombreuses, je le crains, qui s’apercevront avec retard qu’elles ont été manipulées.


Des fuites d’échanges privés de médecins de la World Professional Association for Transgender Health (WPATH) [6], « principal groupe et autorité suprême de médecine trans », ont révélé des choses surprenantes. La présidente, le Dr Marci Bowers, révèle sans fard « qu’à ce jour elle ne connaît aucun individu prétendant avoir un orgasme alors qu’il était bloqué au stade initial de la puberté » [7]. Les chirurgiens parlent de « procédures qui aboutissent à des corps qui n’existent pas dans la nature : ceux avec les deux organes génitaux (vaginoplastie avec préservation du pénis) ; doubles mastectomies sans mamelons ; chirurgie d’annulation, où il n’y a pas d’organes génitaux du tout, juste une peau lisse ». Parents et enfants sont-ils correctement informés de ces conséquences sur la vie sexuelle des transgenres ? Cela vaut-il vraiment la peine de se priver de toute jouissance sexuelle pour sa vie – et sans l’avoir jamais vécue  auparavant et sans savoir ce qu’elle apporte – pour la jouissance cérébrale de se sentir « dans le bon corps » ?


Si ce n’était si grave, il serait plaisant d’évoquer l’étrange retournement de sens opéré par les activistes trans et leurs courtisans : ils accusent ceux qui manifestent leur réticence ou leur opposition à ces mutilations physiques et chimiques des adolescents, de pratiquer de véritables « thérapies de conversion », interdites à juste titre par la loi ! Enfin, qui pratique, justement, de telles « thérapies » ? Les mots ont-ils un sens ? Et ils vont jusqu’à les menacer des foudres de la justice s’ils persistent dans leur opposition en préconisant la prudence et l’abstention – en dehors d’un soutien psychologique visant à écouter les jeunes, filles et garçons, perturbés par l’éveil de leur sexualité et les interrogations qu’elle suscite en eux. Il s’agit d’une incroyable inversion des valeurs : on accuse celui qui ne pense pas comme vous de pratiquer, justement, ce que vous faites éhontément ! La prudence est devenue une intolérable atteinte à la liberté des enfants, la réflexion est bannie au profit de la satisfaction d’un désir immédiat, la méthode scientifique est écartée au nom de l’émotion du ressenti.


Mais… les choses sont peut-être en train de changer ! La secrétaire d’État britannique à la santé commence à être inquiète et a déclaré qu’il fallait « faire en sorte que les soins soient basés sur des preuves, des avis d’experts, et soient dans l’intérêt du mineur  ». Il me semblait que toute la médecine doit reposer sur des preuves et soit mise en œuvre dans l’intérêt des patients ! La secrétaire d’État dévoile crûment, sans s’en rendre compte, les errements du NHS dans les années passées…


Par principe éthique, par respect devant celui qui se cherche et en absence de données objectives consensuelles : on ne touche pas au corps des enfants.

 

Jacques Robert

 

Je remercie Caroline Eliacheff et Céline Masson pour leur relecture critique et constructive de ce billet.


 

[1] Ce n’est pas parce que je cite l’Ecclésiaste (10:16-18) que je suis croyant !

[2] Voir en particulier l’article de Valérie Toranian dans La Revue des deux-mondes (https://www.revuedesdeuxmondes.fr/hier-et-aujourdhui-complaisance-et-aveuglement-des-elites/)

[3] Springora V. Le consentement. Grasset, 2020.

[4] Kouchner C. La familia grande. Seuil, 2021.

[5] Que Céline Masson appelle à juste titre « endoctrinologues »


 

Jacques Robert est professeur émérite de cancérologie à l'université de Bordeaux et praticien hospitalier honoraire à l'Institut Bergonié, le Centre de lutte contre le cancer de Bordeaux, dont il a dirigé le laboratoire de biochimie pendant plus de 35 ans.

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