Lettre à la rédaction sur « Timing de la suppression de la puberté chez les adolescents transgenres et fonctionnement sexuel après vaginoplastie (Van der Meulen et al., 2024) »
Alison Clayton, Jilles Smids, Kathleen McDeavitt - The Journal of Sexual Medicine - 05 Mars 2025
Trad DeepL/ChatGPT
Nous avons lu avec intérêt la publication de Van der Meulen et al.¹ sur la fonction sexuelle chez les jeunes adultes transgenres après un parcours d’intervention incluant la suppression de la puberté (PS), l’œstrogénothérapie et la vaginoplastie. Il est important que des données sur des aspects de la fonction sexuelle tels que l’orgasme, l’excitation et la douleur, recueillies entre 2009 et 2016, soient désormais publiées. Cependant, il n’est pas clair pourquoi ces informations n’ont pas été incluses dans la publication de Bungener et al. en 2020². Il serait utile que les auteurs mettent à disposition l’instrument d’enquête utilisé auprès des participants, ainsi que toute autre donnée de résultats restante. Quoi qu’il en soit, concernant l’article actuel, nous avons plusieurs préoccupations quant aux conclusions de Van der Meulen et al.
Van der Meulen et al. rapportent des données sur la fonction sexuelle chez des adolescents transféminins ayant initié la PS entre les stades de Tanner 2 et 5, suivie d’une œstrogénothérapie et d’une vaginoplastie. Ces résultats sont importants, car il existe très peu de recherches publiées sur ce sujet. L’un des objectifs principaux de cet article était d’évaluer l’impact différentiel de la PS commencée précocement (stades de Tanner 2/3) par rapport à une initiation plus tardive (stades de Tanner 4/5) sur la fonction sexuelle. Cependant, la taille réduite de l’échantillon (n = 37) signifie que l’étude manque de puissance statistique pour détecter des différences entre les groupes, ce qui entraîne un risque élevé d’erreur de type II. De plus, les données sur les difficultés sexuelles ne sont disponibles que pour n = 21 (celles et ceux ayant tenté des rapports sexuels). L’étendue des intervalles de confiance, lorsqu’ils sont fournis, indique une imprécision, et même des différences importantes dans les chiffres bruts entre les deux groupes (par exemple, 14 % contre 57 %) n’ont pas atteint un seuil de signification. Nous ne pouvons donc pas être certains qu’il n’existe pas de différences significatives dans les résultats sexuels entre les cohortes ayant initié la PS précocement ou plus tardivement. Nous aimerions également connaître le taux de réponse (parmi les participants éligibles) ainsi que le taux de données manquantes. L’absence de ces informations limite encore davantage l’interprétation de l’étude.
Une controverse majeure dans ce domaine concerne le risque potentiellement accru pour la fonction sexuelle des adolescents initiant la suppression de la puberté (PS) spécifiquement au stade de Tanner 2. Cependant, cette étude ayant combiné les données des patients ayant commencé la PS aux stades de Tanner 2 et 3, elle ne fournit aucune information significative sur le risque spécifique posé par une initiation à Tanner 2. Les lecteurs doivent également comprendre que seul un très petit nombre de patients (n = 5) dans cette étude déjà limitée ont commencé la PS au stade de Tanner 2. Malgré la taille réduite de l’échantillon et d’autres limitations méthodologiques, il serait néanmoins utile de connaître les données de résultats pour ces patients, étant donné le manque d’informations dans ce domaine. Les auteurs devraient rendre ces données disponibles si possible.
Nous pensons également que les conclusions des auteurs manquent d’équilibre, car elles mettent trop l’accent sur les résultats positifs et minimisent les conclusions plus préoccupantes concernant les effets de la PS, initiée à n’importe quel stade de la puberté, suivie d’une œstrogénothérapie et d’une vaginoplastie. Par exemple, le résumé (section Résultats) rapporte que la majorité des participants qui n’avaient pas connu d’orgasme avant la chirurgie ont déclaré en avoir eu un après l’intervention. Ce résultat favorable est également mis en avant dans les sections Discussion et Conclusion. Cependant, ces sections ne mentionnent pas le fait que 21 % des participants qui avaient déclaré avoir eu un orgasme avant la vaginoplastie ont ensuite signalé ne plus en avoir après l’intervention (suivi moyen de 1,5 an après l’opération). Cette conclusion défavorable est importante, car elle pourrait suggérer que l’anorgasmie secondaire, un effet sérieux, pourrait être un effet indésirable fréquent. De même, les résultats préoccupants selon lesquels la majorité des participants n’avaient soit jamais tenté de rapports sexuels, soit rapporté une “mauvaise” satisfaction lors de ces rapports, et que la plupart éprouvaient des sentiments de honte à propos de leurs organes génitaux, mériteraient d’être davantage soulignés.
De plus, nous ne pensons pas qu’il soit raisonnable de minimiser l’importance d’un taux de 22 % de non-orgasme post-chirurgical et des taux élevés d’autres difficultés sexuelles (régulièrement signalées par 67 % de ceux ayant eu des rapports sexuels) en suggérant que ces taux sont similaires à ceux des femmes cisgenres. Une telle comparaison est méthodologiquement complexe et doit être interprétée avec une grande prudence, en particulier car l’adéquation de la comparaison des caractéristiques physiologiques des hommes natals avec celles des femmes natales est discutable. Par ailleurs, l’affirmation selon laquelle la capacité orgasmique post-vaginoplastie des participants (22 % ne signalant aucun orgasme) est « similaire » à celle des femmes cisgenres (10 % ne connaissant jamais d’orgasme – selon Van der Meulen et al.) ne semble pas correcte, car 10 % ne paraît pas équivalent à 22 %.
Les auteurs soulignent également que de mauvais résultats en matière de fonction sexuelle ont été rapportés chez des femmes transgenres adultes n’ayant jamais reçu de suppression de la puberté avant de subir une vaginoplastie, mais les adultes matures ayant eu des expériences sexuelles antérieures sont clairement plus à même de donner un consentement éclairé. C’est l’un des points centraux de la controverse entourant les interventions de transition de genre pédiatriques. Enfin, bien que nous soyons d’accord avec Van der Meulen et al. sur le fait que le bien-être sexuel englobe plus que la seule fonction génitale, les cliniciens et chercheurs ne devraient pas minimiser le fait que cette dernière est essentielle au bien-être sexuel de la plupart des individus. Ce point est d’ailleurs souligné par les propres citations de Van der Meulen et al., qui insistent sur l’importance du cycle de réponse sexuelle, de la fonction génitale, de la capacité orgasmique et de l’absence de douleur.
En résumé, les principaux enseignements que nous tirons de l’étude de Van der Meulen et al. sont les suivants :
1. L’étude montre que les adolescents ayant suivi un parcours médical/chirurgical de suppression de la puberté, œstrogènes et vaginoplastie au cours de l’adolescence/jeune âge adulte rapportent fréquemment des difficultés sexuelles graves, notamment des troubles de l’orgasme, des rapports sexuels douloureux et un sentiment de honte à propos de leurs organes génitaux.
2. Les limitations méthodologiques, principalement en raison de la petite taille de l’échantillon, empêchent l’étude de fournir des informations significatives sur l’association entre le moment de l’initiation de la suppression de la puberté et les résultats en matière de fonction sexuelle.
3. L’étude ne rapporte pas de manière indépendante les données des patients ayant initié la suppression de la puberté au stade Tanner 2, et des recherches plus rigoureuses et fiables sur les résultats sexuels de cette population spécifique sont urgemment nécessaires.
Loin d’apporter une réassurance, les conclusions de Van der Meulen et al. devraient susciter une réflexion urgente sur les implications éthiques d’un consentement éclairé significatif pour des interventions présentant des risques sérieux pour la fonction sexuelle des jeunes personnes transgenres.
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